A la recherche du son perdu !


Ouvrez bien vos oreilles, vous allez faire une plongée dans l’histoire.

Grâce au développement de nouvelles technologies, l’archéologie prend un nouveau sens. Il n’est plus question de reconstituer uniquement des objets mais aussi des ambiances sonores. 

 

Une petite présentation

Historiens, musicologues, conservateurs de musées, acousticiens, spécialistes des matériaux, informaticiens, architectes collaborent pour développer une nouvelle discipline : l’archéologie sonore. Un certain intérêt pour la restitution de musique disparues a débuté au 19ème siècle. Les premières découvertes archéologiques n’y sont pas pour rien. 

Giusseppe Verdi, en 1871, essaie d’intégrer des instruments de musique de l’Egypte  ancienne dans son opéra Aïda. A la demande du vice-roi Ismaïl. Pacha, qui voulait créer un opéra pour commémorer le canal de Suez, c’est l’égyptologue Auguste Mariette qui écrit le livret. A la même époque, les concerts antiques sur des instruments du 19ème ou des copies d’instruments antiques (réalisées à partir d’iconographie) deviennent à mode. 

Il faut attendre les années 1990 et les “sensory studies” pour que l’organologie (étude des instruments) et les perceptions sonores intègrent le champ de l’étude historique. En France, l’historien Alain Corbin publie en 1994, Les Cloches de la terre : Paysage sonore et culture sensible dans les campagnes au XIX siècle. Il souligne l’importance de l’environnement sonore dans la construction du tissu social.

 

De l’idée au musée


Ces expérimentations ont permis de donner naissance à de véritables projets de transmission et de partage des savoirs.

(c) Wikipédia

L’Institut de recherche et de coordination acoustique/musique (Ircam) et le Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France(C2RMF)  ont en analysant les matériaux et la forme de cinq cornua incomplètes de Pompéi, cuivres conservés au Musée archéologique de Naples, en concevoir des copies virtuelles.

Puis en reliant ces instruments virtuels à un modèle d’instrumentaliste, prenant en compte la position des lèvres et leur interaction avec l’embouchure, les chercheurs ont pu générer un son. Le logiciel de synthèse permet de restituer la sonorité de l’instrument et les notes qu’il peut émettre. Le champs de recherche prend de nouvelles perspectives.

La musicologue Mylène Pardoen a présenté en 2015, le projet Bretez, à la Cité des sciences et de l’industrie, une reconstitution visuelle et sonore du quartier du Grand Châtelet à Paris, au 18ème. Les oreilles entendent le clapotis de l’eau, le bruit des bêtes qui vont à l’abattoir… Pour cela, elle s’est basée sur de nombreuses cartes de la capitale en prenant en compte les artisans mais aussi les textes littéraires, journaux intimes, archive de la police, la météo… Sans oublier l’espace avec l’étude des bâtiments, la forme des rues et tout ce qui est lié à l’acoustique. Elle a été distinguées par le Innovatives 2015 du CNRS.  

 

BONUS : 

Toujours à Paris, le projet “Gens de la Seine”, parcours sonore de récits qui raconte les histoires des riverains de la Seine au 18ème siècle.  Ce projet s’inscrit dans la collection de récits sonores Gens de Paris qui vise à faire découvrir l’histoire de la capitale à partir du vécu de ses habitants. Il a reçu le soutien de la Mairie de Paris, du CNRS, de l’EHESS, du CVT et de l’Alliance Athéna et de Roger-Viollet / Paris en Images.

Écoutez ici : Gens de la Seine 

 

Ces expérimentations prennent également vie dans des expositions.

En 2014, l’Historial de la Grande Guerre de Péronne, organisa l’exposition “Entendre la guerre“. Elle présentait des portraits de musiciens de la Grande Guerre (instruments, partitions, archives de spectacles…) et des reconstitutions des bruits de fond et de musiques. Le compositeur et designer sonore Luc Martinez est allé collecter des sons. Il s’est rendu chez des collectionneurs de la Grande Guerre et dans des commémorations pour recueillir différents bruits (avions, véhicules, armes). Ainsi au grès de l’avancé du visiteur des textes se mélangeaient aux sons lui permettant ainsi d’être mieux plongé au cœur de l’histoire. 

On peut également citer l’exposition “Visiteurs de Versailles“au château de Versailles. Une occasion de reconstituer des ambiances entre 1682 et 1789 à la cour de Louis XIV où  l’on entend hennissements, sabots sur le sol, charrettes, voix, cris des animaux… en plus de découvrir les personnalités du monde entier. 

Ou encore “Musiques! Echos de l’antiquité” au Louvre-Lens qui rend hommage à la musique dans les grandes civilisations antiques, de l’Orient à Rome, en passant par l’Égypte et la Grèce. On peut y voir des instruments disparus et des voix avec des textes antiques. Huit commissaires d’exposition ont voulu faire percevoir et comprendre l’importance de l’art musical.

 

BONUS : 

Puisque nous sommes en pleine commémoration de MAI 68, écoutez aussi la balade sonore géolocalisée et proposée par France Culture et promenez vous dans le quartier latin pendant  heure et quart d’immersion en plein coeur des événements. Vite une oreille dans le passé ! 

Écoutez ici :  Inédit mai 68 – retour au quartier latin 

 

 

L’archéologie sonore a encore de beaux jours devant elle. De nouvelles aventures vont se proposer aux historiens et aux visiteurs.

Une affaire à suivre.

 

 

Article rédigé par Prisca C. et complété par quelques exemples proposés par l’équipe Sème Ta Science 

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